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PASCALE BOURGAUX - Mission : grand reporter

L’actualité internationale, les terrains délicats, elle a ça dans la peau. La reporter de guerre belge Pascale Bourgaux, aujourd’hui installée en France, continue à vulgariser les grands conflits et décrypter les pays du Moyen-Orient. Elle créée la surprise en publiant une BD-témoignage sur les coulisses de son documentaire Les larmes du seigneur afghan.

Elle a le thermomètre de la peur bien réglé. Elle sait que chaque mission est risquée. «  Et c’est bien d’avoir peur dans mon métier. C’est ce qui fait qu’on ne prendra pas de risques inutiles », lance d’emblée Pascale Bourgaux. Toute jeune déjà , la jeune Belge savait qu’elle serait grand reporter. « J’ai toujours eu cette soif de découvrir, de décrypter le monde, de comprendre nos amis, comme nos ennemis. » Pour la RTBF principalement, elle a couvert les guerres au Kosovo, en Iran, en Afghanistan, en Irak, en Lybie et s’est spécialisée dans les sujets liés au Moyen-Orient. En 2011, elle prend le large vers la France où elle travaille et réside depuis trois ans. Et où elle a rapidement fait son « trou ». « J’ai travaillé pendant six mois à l’émission Sept à Huit sur TF1 puis j’ai bossé pour France 24, Le Monde, Paris Match avant de rejoindre TV5 Monde où je couvre aujourd’hui l’international et surtout l’Iran. Là , j’ai commencé la présentation de journaux télé. TV5, c’est une chance magnifique car c’est une télé qui offre un regard pluriel sur le monde francophone, une vraie complémentarité avec notre regard belge. »

La journaliste, qui continue aussi à collaborer avec la RTBF pour des sujets société, travaille toujours avec cette idée en tête, celle d’expliquer, décrypter, transmettre, vulgariser avec cette approche bien à elle. « Dans un reportage, une enquête, un documentaire, je me plonge toujours dans le quotidien d’une famille, d’un village, d’une entreprise, d’une communauté. Je pars d’une situation concrète pour révéler les enjeux sociaux, économiques, politiques et religieux d’un pays. » Ainsi, pour son reportage Iran : au régime des sanctions, primé en Asie, elle part de la filière de l’industrie du tapis pour montrer les conséquences des sanctions internationales en Iran. Dans son documentaire le plus connu, Les larmes du seigneur afghan, elle révèle toute la complexité de l’Afghanistan à travers l’histoire d’un seigneur de guerre, Mamour Hasan, installé au nord du pays. Pendant 10 ans, de 2001 à 2010, elle s’est rendue chez lui et sa famille à plusieurs reprises. Son film montre comment cet homme qui a résisté aux talibans aux cà´tés de Massoud voit une partie de sa famille et de ses villageois basculer dans le camp taliban et rejeter l’Occident. « J’ai essayé de comprendre sur place comment un tel revirement était possible. » Et c’est ce documentaire qui amorce aujourd’hui pour la journaliste un nouveau tournant professionnel, celui de la BD [1] . Avec le dessinateur italien Thomas Campi et le scénariste belge Vincent Zabus, Pascale Bourgaux vient en effet de sortir une BD-témoignage qui raconte les coulisses de cette incroyable aventure professionnelle et humaine en Afghanistan. On y explique le difficile travail de la journaliste et de son cameraman sur place, obligés de se déguiser en Afghans et donc, pour Pasacale Bourgaux, de porter la Burka. L’occasion de montrer aussi le danger permanent, la complexité de la situation. « C’est en quelque sorte le making of du docu. Ce fut un pari un peu fou mais je trouve que le résultat en BD est magnifique. » Et l’aventure ne fait que commencer. Pascale Bourgaux s’est déjà engagée pour une série de cinq tomes où elle sera à chaque fois l’héroà¯ne. Prochaine étape : l’Iran. « Je ne connaissais rien au monde de la BD et son mode de fonctionnement. Mais maintenant que je suis tombée dedans, j’y ai vraiment pris goût. »

La journaliste continue parallèlement à nourrir de nombreux projets de reportages, où souvent la notion d’engagement citoyen est prépondérante. « Oui, je suis quelqu’un de très engagé. Mais loin de toute croyance religieuse car je suis laà¯que. J’ai par contre beaucoup exploré la religion musulmane, par exotisme et pour mieux comprendre les pays que je couvrais. Ma spiritualité, c’est plutà´t l’homme, l’humanité, l’être humain, ses contradictions, ses forces, son pouvoir de mobilisation. »

Sabine LOURTIE
(Photo : Editions DUPUIS)

Cet article a été publié en version restreinte dans le N° 368 du Magazine L’appel (Juin 2014).

[1Pascale BOURGAUX, Thomas CAMPI, Vincent ZABUS, Les larmes du seigneur afghan, Paris, Dupuis, 2014.

Mot(s)-clé(s) : Le plus de L’appel - Guerre
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