ELLE vient d’arriver à l’hà´pital. Dans un sale état. L’accident a été
terrible. On dit qu’on a retrouvé le moteur à plusieurs mètres de la
voiture. Il était 6h du matin. Il paraît qu’ils revenaient d’une discothèque.
On ne sait pas ce qu’il s’est passé. On ne sait jamais dans ces
cas-là . Quand les secours sont arrivés sur les lieux, il était déjà trop
tard pour le conducteur et le passager avant : ils n’avaient pas de ceinture.
Elle, à l’arrière, était attachée. On a dû appeler les équipes spéciales de
désincarcération. Alors qu’elle était toujours bloquée, on essayait de lui donner
les premiers soins. Une heure plus tard, un hélicoptère a pu l’emmener à
l’hà´pital. Une équipe d’urgentistes l’attendait sous la pluie, à l’héliport. Ils ont
couru avec le brancard, car chaque minute comptait. L’opération a duré douze
heures pour la sortir de son voyage entre la vie et la mort. Et ils y sont parvenus.
Anne-Laure vivra.
Pour elle, la vie a eu un
prix. Immense. Pour sauver
une vie, des moyens
considérables ont été mis
en alerte. Et la vie a
triomphé de la mort.
Tout comme lorsque
d’autres médecins tentent
l’impossible pendant
des heures pour éradiquer
un cancer. Quand
des dizaines de secouristes
partent à la recherche
d’un skieur qui a
eu la bonne idée de faire
du « hors-piste » et a été enseveli par une avalanche. Ou quand une armée de
pompiers se lance à l’assaut d’un brasier et saute sur une explosion imprévue.
« La vie ne vaut rien, mais rien ne vaut la vie », dit la chanson. Assurément, dans
nos sociétés, la vie est devenue un bien si important qu’on est prêt à mettre
n’importe quel prix pour la sauver.
Pourtant, au même moment, pour un oui ou un non, on sort un couteau, on
l’enfonce plusieurs fois dans le corps de son prochain. On lui à´te la vie. Et l’on
s’en va. Pour certains, la vie n’a donc plus aucun prix. Plus aucune valeur. On
peut en priver l’autre comme on lui marcherait sur le pied.
Peut-être que, comme dans les jeux vidéo, ceux qui perpètrent ces actes croient
que nous avons plusieurs vies. Que l’on ne tue jamais vraiment.
Il y a deux mille ans, un homme pas comme les autres a dit que rien n’était plus
important que de vivre et d’aimer. Tellement important qu’il n’a pas hésité à sortir
du sommeil de la mort l’ami dont la disparition lui semblait si insupportable.
Au nom de l’amour, et parce que ce qu’il disait en gênait plus d’un, un jour, il
a été dénoncé. Il s’est laissé condamner. Et a donné sa vie, pour ses amis. Il est
mort par amour.
Puis il y a eu la lumière de Pâques. La vie avait vaincu la mort.
Cet homme-là est le messager de la vie, et non de la mort. Jamais il n’a invité les
hommes à tuer, ni à se suicider, se tuer en son nom. Jamais il n’a dit : « Soyez des kamikazes,
comme cela vous serez avec moi au Paradis ». Il n’a cessé de dire que rien
n’avait plus de valeur que la vie. Le paradis, la résurrection, cela commence ici-bas.
Le vrai message de Pâques est « Vive la vie ».