« –“ C’est tout de même incroyable ! On n’en a que pour les musulmans.
Voyez le raffut qu’ils font autour de la caricature de Mahomet. Est-ce qu’on
en fait autant, nous, pour Jésus-Christ ?
–“ Ah ben ça, non. Des images de Jésus, on le voit partout. Nous, quand on
représente nos saints et nos dieux, personne ne s’en plaint !
–“ C’est bien vrai. Notez que quand on va trop loin dans un film ou une publicité,
nos évêques n’hésitent tout de même pas à réagir. Y a des limites à tout,
non ? Vous vous souvenez de ce cinéma que des intégristes avaient incendié
à Paris parce qu’il programmait « La dernière tentation du Christ » ? C’était
un peu fort, c’est vrai. Mais c’était une exception aussi...
–“ Tout à fait. Nous, les chrétiens « normaux », nous savons ce que tolérance
veut dire. Nous regrettons bien parfois que ce ne soit plus comme avant,
quand tout monde n’avait qu’à penser comme nous ou ne pas penser du
tout. Mais on s’y fait, au changement. Aujourd’hui, faut être tolérant. Y faut
de tout pour faire un monde.
–“ N’empêche. Je trouve vraiment qu’on n’en a que pour les musulmans. Pour
le ramadan, c’est la même chose. Ils entament leur jeûne, et voilà que les
médias s’en mêlent. On ne parle que de ça, du fait qu’ils ne s’alimentent pas
avant le coucher du soleil... Et quand le ramadan se termine, les journaux
sont pleins de reportages sur la fête de l’Aà¯d. Regardez un petit peu ce qu’on
dit sur le carême. Ah là , vous aurez beau chercher dans les pages des gazettes.
Vous ne trouverez rien. Vous ne trouvez pas ça choquant, vous ? »
Choc des religions ? Tremblement de terre entre les cultures ? Ou, plus simplement,
difficulté du « vivre ensemble » ? Dans certains milieux catholiques,
on se plaint parfois du traitement « de faveur » qu’auraient désormais les religions
ne portant pas la marque de fabrique « made in Vatican ». Les musulmans,
eux, considèrent que, décidément, ces Occidentaux n’ont aucun respect
de rien, et que c’est toudi les ptits qu’on spotche. En s’en moquant
autant que faire se peut.
Et si l’on s’arrêtait quelques instants
au lieu de jeter un peu plus
d’huile sur le feu ?
Si l’on cherchait à rétablir les
ponts coupés, non sur le dos de
l’indignation et sous prétexte
d’une juste association entre toutes
les religions « persécutées par
la société civile », mais en essayant
de s’écouter et de se comprendre.
Chacun a ses richesses. Celles qu’il
cache parce qu’elles sont trop précieuses
pour être montrées à tous.
Et celles qu’on affiche avec ostentation,
comme à la parade. Voici
justement le temps du carême. Au
lieu de « faire pénitence », pourquoi
ne pas choisir de « faire
confiance », de chercher à comprendre
? Le chemin de Pâques
invite à la conversion. Pas à la
souffrance. Mettons-nous donc en
position d’écoute...