Entrouvrir la porte...
« Les prêtres bientà´t mariés ? Peut-être. Le numéro deux du Vatican Monseigneur Pietro Parolin a brisé le tabou de leur célibat aujourd’hui. » Mi-septembre, cette nouvelle a fait le tour des salles de rédaction, et comme à leur habitude, les médias se sont emballés. Avec quelques raccourcis saisissants, comme cette affirmation selon laquelle Mgr Parolin était déjà n° 2 du Vatican alors qu’il ne prendra ses fonctions de Secrétaire d’État du St-Siège qu’à la mi-octobre. À l’heure de la fameuse déclaration, le prélat n’était encore que nonce apostolique au Venezuela et n’engageait donc pas son « patron » de la même manière. De plus, en déclarant que le célibat des prêtres catholiques n’était « pas un dogme de l’Église », le prélat ne
prononçait pas des paroles révolutionnaires. La chose est acquise depuis longtemps. Là où Mgr Parolin innovait quelque peu, c’est en ajoutant que le célibat était « une tradition ecclésiastique » et que, donc, « on peut en discuter ».
Il faut aussi reconnaître que, sur ce point, le futur bras droit du pape ne faisait que rejoindre d’autres responsables de l’Église, qui affirment la même chose depuis des années. En 2010, Mgr Josef De Kesel, évêque de Bruges et ancien évêque auxiliaire de Bruxelles, déclarait déjà : « Je pense que l’Église doit se poser la question de savoir s’il convient de conserver le caractère obligatoire du célibat. » Et il ajoutait : « On pourrait dire qu’il y a des prêtres célibataires mais que des personnes pour lesquelles le célibat est humainement impossible à respecter devraient aussi avoir la chance de devenir prêtre. » De la part du successeur de Mgr Vangheluwe, il s’agissait d’une parole forte... mais Mgr De Kesel n’était pas nonce, et il n’avait pas été choisi par le pape pour diriger le gouvernement du Vatican...
« Beaucoup de bruit pour rien », se sont empressés de commenter certains médias catholiques, en France notamment, après la diffusion des extraits de l’interview du prélat. Nous serons plus positifs.
Bien sûr, il ne faut pas accorder plus d’importance qu’il ne se doit à quelques phrases, parmi bien d’autres, prononcées pendant une interview qui a duré plus d’une demi-heure et qui n’était destinée qu’à un quotidien de Caracas ayant une diffusion limitée. Le fait qu’il ait fallu près de quatre jours après leur publication pour que ces quelques mots fassent le tour de la planète médias confirme qu’ils n’étaient pas destinés à apparaître comme d’officielles déclarations fracassantes.
Mais la petite phrase de Mgr Parolin représente une volonté d’entrouvrir, vis-à -vis de situations précises, une porte que, ces derniers temps, on voyait plutà´t bouclée à double tour. De même, les déclarations du prélat selon lesquelles l’Église catholique doit pouvoir afficher une ouverture vis-à -vis de « l’air du temps » ou que, sans être elle-même une démocratie, elle doit manifester un « esprit démocratique » semblent confirmer une
volonté de réduire le fossé entre une institution murée dans sa Vérité et son Histoire et le monde qui l’entoure. Le chemin, sûrement, est encore long et semé d’embûches. Mais si seulement de pareilles petites phrases permettaient de se mettre en route...
Frédéric ANTOINE