2016 : Rehausser le niveau.
Tout est question de mesure. Et du point de vue selon lequel on se place. Dans le rituel du nouvel an, les voeux s’échangent à profusion. Une vraie ritournelle : bonheur, santé, réussite... Que du mieux à volonté ! S’ils n’étaient d’abord un geste d’amitiés ou d’amour, une manifestation de la préoccupation portée à l’autre, une tendresse qui invitée à dépasser ce qui fait notre quotidien...les voeux seraient vains.
Pourtant, ils peuvent teÌ moigner d’un deÌ sir tellement humain : celui de la recherche d’un avenir meilleur, une sorte d’espérance que cela ira - ou pourrait aller - mieux demain. Même s’il regarde vers le futur, l’homme ne peut pourtant pas s’empêcher de comparer avec le passé. Et de mesurer. Au jeu des bilans, la fin 2015 n’aura pas failli à cet autre rituel des rétrospectives. Avec un gout amer en fin de piste.TermineÌ e comme elle avait commenceÌ - entre Charlie Hebdo et le Bataclan en France - l’anneÌ e 2015 aura vibreÌ au son des attentats ou de leur potentielle menace. De niveau trois ou quatre, l’impression est que notre monde est plus insécurisé aujourd’hui qu’hier.... Le nombre de victimes, la proximiteÌ des eÌ veÌ nements et le fait qu’ils soient relateÌ s quasi en direct accroît le niveau de cette perception. Question de mesure... Plus proche, la menace est toutefois aussitoÌ‚t deÌ joueÌ e et mise aÌ€ distance par le second degreÌ de videÌ os, dessins, caricatures... qui ont envahi les reÌ seaux sociaux dans les semaines qui ont suivi les attentats parisiens de novembre 2015. ApreÌ€s l’horreur et la compassion, l’humour reprenait le devant de la sceÌ€ne comme une jeune pousse d’optimisme.
Et de l’optimisme, la Belgique en a bien besoin pour redorer son image ternie par deux fois. D’une part, aÌ€ propos des attentats, les Français accusaient les Belges de ne pas être « au niveau », de ne pas avoir décelé l’imminence des attentats, d’être laxiste, nuls en prévention et en suivi des potentiels terroristes. AÌ€ cela s’ajoutait la stigmatisation d’une commune : Molenbeek...
D’autre part, il y a eu la COP21. AÌ€ peine remis des uppercuts français, les Belges se tiraient eux-meÌ‚mes une balle dans le pied aÌ€ l’entame du sommet de Paris sur le climat, donnant l’impression de l’impossibiliteÌ de se mettre d’accord dans un feÌ deÌ ralisme décidément mis aÌ€ rude eÌ preuve. « Rehaussez les deÌ bats, relevez le niveau » aurait-on envie de crier au monde politique. Car tant en matieÌ€re de seÌ curiteÌ qu’en matieÌ€re climatique, les reÌ ponses et les outils mis en oeuvre n’atteignent pas toujours le niveau que l’importance des enjeux reÌ clamerait. Alors, en ce deÌ but 2016, si des voeux devaient eÌ‚tre formuleÌ s, ce serait sans aucun doute ceux de relever le niveau de la coheÌ rence et de la loyauteÌ feÌ deÌ rale d’un EÌ tat deÌ jaÌ€ si compartimenteÌ . Car aujourd’hui, ce n’est plus la mesure du « small is beautiful » qui suffit, mais aussi celle de l’efficience et de l’efficaciteÌ .
Et si nos socieÌ teÌ s du doute, de l’angoisse et de la peur du lendemain ne veulent pas sombrer davantage - comme semblent l’illustrer les reÌ centes eÌ lections reÌ gionales de nos voisins français - dans les crises identitaires et les extreÌ mismes, c’est aÌ€ la mesure de la qualiteÌ des reÌ ponses qu’ils contribuent aÌ€ apporter que nos eÌ lus seront eÌ valueÌ s. C’est toujours moins compliqueÌ que de deÌ crocher la lune. Ou de mesurer les nuages...
Bonne année !
Stephan GRAWEZ, ReÌ dacteur en chef adjoint