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Edito

UNE AFFAIRE INTIME.

Il y a un an, la RTBF diffusait dans le cadre de son magazine Questions à la une l’enquête-reportage d’une de ses jeunes journalistes, Thi Diêm Quach, intitulé « Avortement : la grande hypocrisie ? ». Cette jeune femme d’environ trente ans y découvrait, à son plus grand étonnement, qu’en Belgique, l’interruption volontaire de grossesse relevait toujours du Code pénal
et que celles qui y avaient recours (ainsi que leurs médecins) risquaient de graves condamnations.

La réaction de cette journaliste face à ce dossier était significative : Thi Diêm Quach a dû naître aux alentours de 1990, lorsque la loi Lallemand-Michielsen libéralisant le recours à l’avortement était juste votée au Parlement belge, puis promulguée alors que le roi Baudouin se déclarait temporairement dans l’incapacité de régner. Elle a donc toujours vécu dans un environnement où le recours à l’IVG paraissait relever des choses admises.

Toute une génération âgée de moins de quarante ans au moins ne peut aujourd’hui comprendre que l’interruption de grossesse soit considérée, sauf exception prévue par la loi, comme un acte pénalement répréhensible.
Qu’il soit assimilé à un délit, justifiant théoriquement encore une condamnation, est, de nos jours de l’ordre de l’impensable. Se décider de recourir à l’IVG paraît clairement à nos contemporains relever
du choix et de la conscience éclairée de chacun. En 2018, cela tient de l’évidence. Tout en sachant les angoisses, les drames et les souffrances que cette décision peut faire encourir, à chacun d’agir selon
son sens moral, ses convictions, et en fonction des
circonstances. Il s’agit là d’une décision personnelle,
intime et privée.

À l’époque qui est la nà´tre, et dans notre pays, qui pourrait encore comprendre qu’un courant d’opinion ou de pensée, quel qu’il soit, et quelle que soit sa représentativité de l’opinion, estime légitime d’imposer
à toute une société les options de société qu’il considère bonnes et pertinentes ? Dans notre monde, ce n’est que lorsque l’intérêt général est menacé par la liberté individuelle qu’il paraît normal que l’État et le
législateur interviennent.

L’actualité récente démontre pourtant que, dans certains
autres coins du monde, cette reconnaissance de la liberté de conscience personnelle n’est toujours pas de mise...

Les actuels débats politiques autour de la sortie de l’avortement du Code pénal ne peuvent nous laisser indifférents. Dans ce numéro de rentrée, nous tentons d’ouvrir la réflexion et de l’élargir, à notre manière. Dans notre volonté d’apporter notre pierre au débat dans un monde où l’attitude, l’opinion et les choix de chacune et chacun sont tous respectables,
évidemment non condamnables, et ne peuvent pas inspirer une attitude simplement « miséricordieuse ».

C’est ainsi, nous semble-t-il, que, toutes et tous ensemble, nous pourrons construire un meilleur monde pour demain.

Frédéric ANTOINE

Rédacteur en chef

Mot(s)-clé(s) : L’édito
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