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Edito

QUAND L’APPEL INVITAIT J.GAILLOT.

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En ce jour d’avril 1995, la foule se pressait aux palais du Heysel. Car, parmi les conférences organisées alors à la Foire du Livre, il y en avait une qui allait faire du bruit. Elle réunissait Gabriel Ringlet, dont la liberté de parole était déjà bien ancrée, et Mgr Jacques Gaillot, évêque de Parténia, siège épiscopal algérien « disparu sous les sables » au Ve siècle. Quatre mois plus tà´t, celui qui était alors évêque d’Évreux avait été révoqué par Jean-Paul II en raison de ses prises de position trop progressistes. L’événement avait fait grand bruit. Mais le ci-devant évêque n’avait encore que rarement pris la parole depuis lors, ni n’était intervenu sur un thème aussi sulfureux que Dialogue et liberté dans l’Église. Et jamais avec Gabriel Ringlet...

Un événement hors du commun devait se produire...

J’ai choisi d’évoquer ce moment alors que Jacques Gaillot vient de disparaître parce qu’il est intimement associé à  L’appel . Cette rencontre était en effet coorganisée par notre magazine et par les éditions Desclée de Brouwer, dont Maurice Luca, alors le représentant en Belgique, avait pris l’initiative.

L’appel se voulait à la pointe du combat pour une Église catholique ouverte et progressiste. À l’instar de Gabriel Ringlet, mais dans un autre registre, Jacques Gaillot en était pour nous l’incarnation.

Une heure avant la conférence, il a fallu se rendre à l’évidence que l’auditorium prévu pour l’événement serait incapable d’accueillir toute la foule présente. Dans l’urgence, on nous a mis dans un immense palais, où plus de mille personnes ont pu assister à la surprenante rencontre entre deux hommes qui n’avaient encore jamais eu l’occasion de se croiser...

En tant que rédacteur en chef de L’appel, il m’était re- venu de mener l’entretien. Il était magique d’entendre comme les deux prêtres, théologien et homme d’action, étaient, chacun à sa manière, sur une même longueur d’onde. Et comme l’union s’opérait entre eux jusque dans le verbe et la façon de s’exprimer.

Pendant plus d’une heure, j’ai vécu alors une sorte de moment suspendu. Près de trente ans plus tard, je ne me souviens plus de l’ensemble de la rencontre. Mais en tout cas de la dernière question, où j’avais demandé à l’évêque français si, comme on le disait, il portait bien toujours des chaussures de la marque Mephisto...

Affirmer que je n’ai plus de souvenir des propos échangés n’est pas tout à fait exact. À peine cette incroyable rencontre terminée, il est en effet apparu à L’appel, ainsi qu’aux éditions DDB, que cet échange-là ne pouvait rester confiné au Heysel. Il fallait que ces deux libres paroles circulent. L’enregistrement de la conférence sera ainsi, très rapidement, recopié sur cassettes à des centaines d’exemplaires, diffusés dans tous les milieux. Cinq mois plus tard, L’appel et DDB publieront aussi ensemble un livre reprenant l’intégralité des échanges du Heysel, accompagnés d’un texte introductif de Gabriel Ringlet. Le livre Dialogue et Liberté dans l’Église, lui aussi, circulera largement.

La rencontre dont L’appel était le coorganisateur sera le point de départ d’une longue amitié entre Jacques Gaillot, Gabriel Ringlet et l’équipe du Prieuré de Malèves-sainte-Marie. À l’heure de l’au revoir, je ne pouvais manquer d’évoquer ce souvenir quelque peu personnel, mais si fort pour L’appel. La nouvelle du décès de Mgr Gaillot nous étant parvenue alors que ce numéro était par ailleurs bouclé, c’est toutefois dans nos éditions ultérieures que nous évoquerons son oeuvre.

Adieu, Jacques. Et merci.

Frédéric ANTOINE

Rédacteur en chef du magazine L’appel

Mot(s)-clé(s) : L’édito
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