Des livres pour la rentrée
Des livres pour la rentrée
Des livres pour la rentrée…
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HERSTAL, 1966
Michel Peeters vit en Andalousie depuis 20 ans, lorsqu’il apprend que le cadavre de son père, disparu depuis trois décennies, vient d’être retrouvé au fond d’un puits à Herstal. Il rentre en Belgique, persuadé qu’il a été assassiné. En interrogeant les témoins de l’époque, il replonge au moment de la grande grève des ouvrières de la FN à Herstal en 1966. Bien que soumises au patriarcat, elles ont alors osé revendiquer l’égalité salariale entre hommes et femmes. Mais son enquête lui fait découvrir aussi un père bien éloigné du souvenir qu’il en a gardé. Qui avait intérêt à le tuer ? Réponse au terme d’un suspens habilement mené. (J.Ba.)
Gisèle Eyckmans, Le disparu de Herstal, Louvain-la-Neuve, Academia, 2025.
L’AIR DU TEMPS
Vincent Delerm persiste et signe dans son relevé attentif des petites phrases entendues dans la conversation courante. Elles sont apparemment anodines, mais l’auteur a l’art d’en souligner le côté cocasse ou profond. Elles révèlent les comportements sympathiques ou les travers peu glorieux de ses contemporains, et plus largement l’époque actuelle. Voici quelques titres de ces mots du quotidien qui donnent envie d’en savoir plus : « Je ne souhaite cela à personne » ; « T’inquiètes » ; « Ah oui, non mais moi » ; « Elle m’a fait une angine » ; « On refaisait le monde » ; « Moi je crois beaucoup à ça ». 35 brefs récits à savourer avec bonheur. (G.H.)
Philippe DELERM, Les gens sont comme ça, Paris, Seuil, 2024.
L’ÂME RUSSE
Pour comprendre la Russie, les livres d’Andreï Makine, qui y a vécu de 1957 à 1987, offrent des éclairages bien utiles. Il raconte ici de manière romancée l’histoire vraie d’un jeune communiste français en visite officielle en 1939 en URSS. Découvrant l’envers du décor “paradisiaque”, il est contraint à rester sur place. Il participe à la guerre et est condamné aux camps de travail, tout en trouvant de la solidarité dans l’épreuve. Son retour en France en 1969 sera une désillusion : il voit un pays surtout avide de consommation et de libération sexuelle. Interpellante réflexion finale sur l’amour plus large dans la rudesse de la vie. (G.H.)
Andreï MAKINE, Prisonnier du rêve écarlate, Paris, Grasset, 2025.



DES COMBATTANTS DE L’OMBRE
Janine, Mike, Robert, Lucile ou Nicole sont des résistants pris dans le tourbillon de la Seconde Guerre mondiale. Ils font face à l’ennemi en organisant une filière d’évasion – principalement d’aviateurs anglais – à travers les Pyrénées. Mais le danger est aussi à l’intérieur, « la police française est plus efficace que la Gestapo. Les agents français n’ayant aucun scrupule à mener des interrogatoires musclés et à lui donner des résistants. »Un roman poignant et palpitant, une sorte de docu-fiction rendant hommage mérité à ces héros de l’ombre. (M.L.)
Jean-Yves PITOUN, les amants de la France Libre, Paris, Albin Michel, 2025
MACHIAVÉLIQUE !
Ève est prof de math, son mari, Nate, enseigne l’anglais dans le même établissement, et Addie est élève dans leurs deux classes. Chacun écrit son histoire en parallèle. Triple focus sur les mêmes événements dispensés tel un poison violent, mais imperceptible et pervers. Puzzle machiavélique et insidieux entre ces protagonistes, d’autant que l’année précédente, un professeur a été licencié parce qu’il aurait eu une liaison avec Addie. Angoisse, suspense, manipulations, mensonges à gogo, révélations incroyables tout le long, rebondissements… Et une fin qui permet toute interprétation, sans laisser sur sa faim. Hitchcock n’aurait pas fait mieux. (M.L.)
Freida McFADDEN, La prof, Paris, City éditions, 2025.
Écrits surréalistes
Ce recueil de 400 pages rassemble les écrits de Pol Bury, connu surtout pour ses sculptures cinétiques. À côté de ses productions plastiques, il a également eu une intense activité d’écriture, fondant, avec André Balthazar, Le Daily Bul, revue, puis maison d’édition et centre d’art toujours en activité. Parmi ses écrits, des textes poétiques et des manifestes artistiques, d’ailleurs tout aussi poétiques et surréalistes. En témoignent quelques titres : « La flèche et l’escargot », « L’Art à bicyclette et la Révolution à cheval » ou « Les petits moutons blancs qui sortent en rang du lavoir ». Nombreuses illustrations. (J.G.)
Frédérique Martin-Scherrer, Pol Bury Anthologie. Recueil de textes (1949-2004), CFC éditions, Bruxelles, 2025.


À DÉGUSTER PAR PETITES GORGÉES
Dans ce roman de l’autrice islandaise de Rosa Candida, le lecteur se trouve face à un ensemble de petites touches impressionnistes qui explorent, en douceur, l’âme humaine dans son inconsistance. Issue d’une lignée de sage-femmes, nommées « mères de la lumière » sur son île, l’héroïne met au monde son 1922e bébé en livrant les mille et une visions de son existence dite “normale”. Grâce à cette pseudo normalité, elle entraîne le lecteur dans un beau voyage personnel de ce qui est peut-être l’essentiel de la vie, fragile comme une aurore boréale fréquente en cet endroit un peu éloigné du monde. (B.H.)
Audur Ava OLAFSDOTTIR, La vérité sur la lumière, Paris, Zulma, 2025.
COMPRENDRE L’ÉCRITURE
Comment être à la fois écrivain et lecteur ? Cette encyclopédie subjective de littérature et des techniques littéraires invite à participer à une littérature en marche. Tous les genres littéraires sont embrassées, du haïku aux formes épistolaires, en passant par la poésie contemporaine et bien d’autres. De riches exemples illustrent les arcanes de la création dans sa complexité et sa diversité. L’auteur donne ainsi les clés d’un royaume dont on ne se lasse jamais et qui aidera le néophyte ou le spécialiste à parcourir les chemins parfois tortueux des mots et des phrases créés par les auteurs de tous types et de toutes époques. (B.H.)
Hubert HADDAD, Le nouveau magasin d’écriture, Paris, Zulma, 2025.


 LA DÉCOUVERTE DU PÈRE
Le chemin des estives, récit du cheminement pendant quelques semaines de Charles Wright à travers le Massif central, a suscité, en 2021, l’intérêt d’un vaste public. Un succès inattendu et interpellant. Que faire ensuite ? L’idée a germé de repartir pour un autre périple, non plus à pied mais en voiture, en Angleterre et… avec son père originaire de ce pays. Objectif : retourner ensemble sur les lieux de la jeunesse de cet homme, retrouver ses amis d’alors, les villes où il a vécu, avant de se marier avec une Française, d’aller vivre en France et y faire souche. L’auteur découvre ainsi ce que les Anglais ont vraiment de particulier et constate combien cet environnement a influencé la manière d’être de son père.
Ce périple est aussi l’occasion de tenter de comprendre les parcours de vie de membres de la famille décédés. Le récit lève le voile sur des secrets jusqu’alors bien gardés, les vies cabossées de certains, les traces laissées dans la mémoire et la vie des générations actuelles. Avant ce voyage, l’écrivain avait une image peu flatteuse de son père. Ce séjour en sa compagnie va agir comme une révélation progressive. Il découvre le bon côté de son caractère typiquement anglais, la discrétion, la courtoisie, une présence aimante, même si largement silencieuse. Ce second récit de voyage confirme le talent de l’auteur qui touche le lecteur par son don d’observation, l’écriture légère et l’inspiration spirituelle qui l’anime. (G.H.)
Charles WRIGHT, Le jardin anglais, Paris, Albin Michel, 2025.
UNE OPINIÂTRE PETITE FILLE
Pour bénéficier de la surprise que livre le dernier roman d’Amélie Nothomb, il faudrait en entamer la lecture vierge de tout élément qui en évoque la clé, voire de toute connaissance de la vie personnelle d’Amélie, dont ses récits ne cessent de révéler des pans. Ceux qui n’en sont pas familiers réussiront à entrer petit à petit dans l’histoire de cette petite fille crâneuse, différente des autres, et de ses difficiles relations avec une mère étrange, poursuivie par une irrésistible haine des chats. Les fanatiques de l’auteur devineront sans doute plus aisément à qui la narratrice rend ici à sa façon hommage au fil d’une narration faite de petites touches d’événements qui auront bâti l’existence d’une femme en lutte pour s’émanciper d’un milieu plutôt oppressant. Et dont la maxime de vie se résumait par l’expression « Tant mieux », qu’elle peinait elle-même à doter d’un véritable sens. Sinon que c’était peut-être « la version joyeuse du sang-froid ». Si l’on veut comprendre ce qui fait le suc de ce livre, il ne faut donc surtout pas l’ouvrir aux pages 185 et suivantes. (F.A.)
Amélie NOTHOMB, Tant mieux, Paris, Albin Michel, 2025.