En ces temps où l’on vit de plus en plus dans l’immédiateté, sans doute est-ce instructif de se souvenir, lors d’anniversaires, de femmes et d’hommes ayant eu de profondes influences de leur vivant et aussi pour l’avenir. Sans pour autant tomber dans les discours d’anciens combattants ou d’ex-militantes mais en restant de bien modestes “passeurs de mémoires”. On fête par exemple cette année le 1700^e anniversaire de cet important événement pour le christianisme que reste le concile de Nicée, qui s’est tenu du 20 mai au 25 juillet 325. Et en septembre, un congrès marquera le centenaire du début des Conversations de Malines entre catholiques et anglicans, étape majeure pour l’œcuménisme.

APPORTS TOUJOURS ACTUELS

2025 est aussi marquée par le 80^e anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale. L’occasion de se souvenir qu’avant d’être pendu par les nazis en avril 1945, le pasteur Dietrich Bonhoeffer avait écrit : « Notre “être-chrétien” ne peut avoir aujourd’hui que deux aspects : la prière et l’action pour les hommes, selon la justice. »Une affirmation qui reste d’actualité pour les chrétiens et leurs Églises, mais pas seulement, en Allemagne comme ailleurs. Il est également bon de rappeler que c’est à la fin de ce conflit qu’ont été mis en place, en Belgique et en France, les fondements du système de sécurité sociale quelque peu mis à mal depuis. En mars dernier, on a évoqué le 75^e anniversaire de la mort en 1950 du philosophe Emmanuel Mounier, directeur de la revue Esprit et principal inspirateur du courant personnaliste au-delà des seuls milieux chrétiens. Le même mois, la création en 1945 du mouvement catholique pour la paix Pax Christi International, dont le secrétariat est à Bruxelles, a été notée. Ses quelque cent vingt branches ont bien des défis à relever face aux réarmements actuels !

Le 1^er mai, la Jeunesse ouvrière chrétienne (JOC), devenue internationale un quart de siècle plus tard et toujours combative – selon un autre usage de la lettre “C” – en Europe et surtout dans les pays du Sud, a célébré son centenaire à Laeken. Là où, dès 1912, des groupes de jeunes travailleurs et travailleuses chrétiens avaient été formés par Joseph Cardijn. Comme l’a dit Mgr Delville au nom des évêques de Belgique, il ne s’agissait pas de fêter cent jours, mais bien cent ans d’actions pour l’émancipation des jeunes du monde du travail. Des membres venus de tous les continents l’ont prouvé en liant le passé, le présent et l’avenir du mouvement. Avec chaque fois, en toile de fond, la méthode Voir-Juger-Agir reprise par des papes et bien d’autres acteurs dans et au-delà de l’Église catholique.

RELIRE MAURICE ZUNDEL

Le 8 août prochain, il y aura cinquante ans que mourrait le prêtre suisse Maurice Zundel, dont, dans les colonnes de L’appel, Marie Balmary a rappelé des réflexions. Des associations helvète, française ou belge qui portent le nom de ce grand mystique, dont les écrits sont à relire en ce temps de recherche de sens et de spiritualité, se chargent de rappeler qu’il était au carrefour des théologies protestante et catholique. À son sujet, en 2009, dans 40 jours avec Maurice Zundel et les Pères du désert, référence aux moines qui ont vécu il y a plus de mille cinq cents ans en Égypte et à Gaza, le père Patrice Gourrier et Jérôme Desbouchages proposaient « un chemin de croissance humaine et spirituelle ». À propos du Proche-Orient, on relèvera qu’en avril, lors du 50^e anniversaire de Microsoft, des employés ont dénoncé les contrats de l’entreprise avec Israël qui ont permis de sélectionner des cibles à bombarder à Gaza et au Liban, alors qu’ils rappelaient que la société avait arrêté d’investir en Afrique du Sud durant l’apartheid.

Avril dernier, également, la guerre du Vietnam se terminait un demi-siècle plus tôt. L’occasion de redire les dramatiques effets de l’agent Orange déversé par les Américains sur une population aux riches diversités spirituelles. Enfin, 2025 se refermera sur le 60^e anniversaire de la clôture du concile Vatican II. Sur celui-ci, Luc Verstraete, centenaire et sans doute doyen des prêtres belges, a confié à La Libre le regret que l’Église n’ait pas davantage tiré de sa réforme, que les messes ne soient pas plus participatives, que les laïcs y assistent trop de manière « passive » et « assis au fond comme des enfants sages ». Bien d’autres “passeurs de mémoire” pourraient en dire tout autant, sans nostalgie et en se tournant vers l’avenir, à propos d’événements vécus il y a plus ou moins longtemps et qui continueront à marquer la vie et le futur de notre monde.

Jacques BRIARD