Vatican III ?
Vatican III ?
Depuis le Concile Vatican II, le rêve d’un Vatican III a souvent surgi. Le Synode actuel en cours, en plusieurs phases, serait-il un Concile qui ne dit pas son nom ?
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Une dizaine d’années après Vatican II, le Cardinal Martini parlait déjà d’un futur Concile devant traiter des questions brûlantes soulevées alors dans l’Église. Par la suite, le désir d’un Vatican III a souvent surgi, aussi bien dans la presse que dans l’ensemble du Peuple de Dieu. Selon plusieurs observateurs, le Synode actuel sur la synodalité, avec ses réunions nationales, internationales et continentales, ainsi que ses sessions plénières réparties sur quelques années, est en réalité un Concile qui ne dit pas son nom.
PROJETS HUMAINS COMPLEXES
Il serait difficilement pensable aujourd’hui de réunir en un même lieu, durant une période prolongée, les quelque 5400 évêques actuels. Évidemment, avec les possibilités actuelles d’informatique, il serait possible d’imaginer les participants se réunissant simultanément en trois ou quatre endroits différents de la planète, interconnectés par satellites. On parlerait alors du Vatican-III-Zoom. La formule actuelle du Synode sur la synodalité, avec sa longue période de préparation à plusieurs niveaux, et ses sessions successives à environ un an de distance, comme on avait connu avec Vatican II, arrive au même résultat, même si, techniquement, il convient de parler de Synode plutôt que de Concile.
D’une part, le nombre actuel des évêques rendrait difficile une réunion un peu prolongée de ce grand corps épiscopal avec tous les autres participants habituels (membres de la Curie, représentants des grands Ordres religieux, invités des autres Églises, etc.). Il y a aussi le fait que la conscience, sinon la conception de la collégialité et de la synodalité, a évolué au cours des derniers pontificats. Lorsqu’on parlait de collégialité au temps de Vatican II, on pensait essentiellement à la responsabilité collégiale de tous les évêques, en communion avec le successeur de Pierre, pour la vie de toute l’Église. Peu à peu, la réflexion a glissé vers la notion de synodalité, qui implique d’abord la responsabilité personnelle de tous les membres du Peuple de Dieu, avant même d’impliquer celle des évêques et du Pape.
La conscience ecclésiale actuelle porte désormais son attention sur les processus plus que sur des événements ponctuels. Le pape François, dans son premier grand document, Evangelii gaudium, parlait de quatre grandes polarités dont la première est celle de la priorité du temps sur l’espace. Pour lui, dans la vie de l’Église comme dans la société en général, ceux qui privilégient le temps sont ceux qui génèrent des processus de croissance, lesquels développent leur propre dynamisme interne, alors que ceux qui privilégient l’espace sont ceux qui s’accrochent aux espaces de pouvoir et de contrôle. C’est là quelque chose de très important pour François, qui y revient dans plusieurs discours et documents. Il est évident que, pour lui, le présent Synode a été conçu non comme un événement – même pas un événement réparti sur plusieurs moments – mais bien comme un processus.
Ce processus a déjà transformé le visage de l’Église. Il ne sera plus possible dans les années à venir d’imaginer un Synode, ni même un Concile œcuménique, composé uniquement d’évêques et uniquement d’hommes. Toute grande réunion ecclésiale comme celle en cours demandera la participation active, avec droit de parole et de vote, de représentants de tous les groupes composant l’ensemble du Peuple de Dieu : laïcs, clercs et religieux ; hommes et femmes.
LA MAIN DE DIEU
Quiconque vivait à Rome dans les années 1962-1965, pouvait percevoir dans l’atmosphère de la ville Éternelle l’action de l’Esprit saint accompagnant l’immense travail humain impliqué dans cette aventure humaine et spirituelle, et se jouant plus d’une fois des projets et des calculs humains. De nos jours, l’énorme évolution des moyens de communication intervenue au cours du dernier demi-siècle permet à l’ensemble de la chrétienté – et même de toute l’humanité – de percevoir la main de Dieu dans le processus ecclésial en cours.
Armand VEILLEUX, Moine de l’abbaye de Scourmont (Chimay)