Le 9 janvier 1915, une grande image occupait la premieÌ€re page du magazine anglais Illustrated London News. Celle d’un soldat allemand traversant, la nuit de Noël, le no-man’s land des trancheÌ es en direction des troupes allieÌ es, un petit sapin et une lanterne aÌ€ la main, pour inviter les ennemis aÌ€ cesser le feu. Comme nous le rappelons dans nos pages 6 et 7, d’autres treÌ‚ves ont eÌ mailleÌ les premiers Noëls de cette terrible guerre. Elles ont renforceÌ l’ideÌ e selon laquelle Noël est le moment ideÌ al pour arreÌ‚ter les combats. Dans le monde francophone, on utilise meÌ‚me l’expression « treÌ‚ve des confiseurs » pour deÌ signer la peÌ riode ouÌ€, s’il y a bien une profession qui ne peut se permettre de treÌ‚ve... c’est d’abord celle des fabricants de douceurs.
Un paradoxe ? Pas vraiment. La formule remonte aux anneÌ es 1870, lorsque des oppositions dangereuses traversaient la politique française. Celles-ci rendaient la vie aÌ€ Paris si hasardeuse que les commerçants ne reÌ ussissaient plus aÌ€ faire affaires aux environs de Noël. Afin de calmer le jeu, les politiciens avaient alors deÌ cideÌ de suspendre leurs luttes fratricides pendant le mois de deÌ cembre... afin de permettre au commerce de retrouver ses droits.
Aujourd’hui, la notion de treÌ‚ve de Noël s’est banaliseÌ e. Ce n’est pas sans raison que les hostiliteÌ s sociales et politiques seront suspendues en Belgique aÌ€ partir de ce 16 deÌ cembre. En 1960 aussi, le gouvernement avait imagineÌ de nouveaux impoÌ‚ts, le releÌ€vement de l’aÌ‚ge de la retraite dans le secteur public et un controÌ‚le accru des choÌ‚meurs. Il avait aussi emballeÌ tout cela dans un seul projet de loi : « la loi unique ». Mais, aÌ€ l’eÌ poque, les premiers arreÌ‚ts de travail avaient eu lieu le 14 deÌ cembre, et la greÌ€ve geÌ neÌ rale avait eÌ teÌ deÌ clareÌ e le 20. En Wallonie, elle durera cinq semaines. Il n’y avait donc pas eu de treÌ‚ve. Ni pour Noël. Ni pour les confiseurs. Cette anneÌ e, tout le monde feÌ‚tera la NativiteÌ . 2015 sera-t-elle moins terrible pour autant ? Pas suÌ‚r ! Profitons donc de ce temps qui suspend son vol.
Bonne trêve à toutes et tous !