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Edito

Populaires ou élitaires ?
Septembre 2015. Dans les cours de reÌ creÌ des eÌ coles publiques, il y a deÌ sormais un nouveau rang : celui des « ni-ni ». Les enfants qui ne suivent ni le cours de religion ni le cours de morale, en vertu de la deÌ ci sion de la Cour constitutionnelle du 12 mars, deÌ creÌ tant que personne ne pouvait obliger les eÌ leÌ€ves aÌ€ choisir entre cours philosophiques et de morale non confessionnelle. Les « ni-ni » obtiendront-ils une dispense ? Auront-ils « eÌ tude » quand les autres s’appliquent aÌ€ suivre le programme d’un cours ? Pourront-ils simplement rentrer chez eux ? Le principe de liberteÌ , qui empeÌ‚che de contraindre au choix, est un des fondements des socieÌ teÌ s deÌ mocratiques. Mais ne risque-t-il pas de reÌ duire la clienteÌ€le des cours philosophiques et de morale aux (enfants de) « convaincus », tandis que ceux qui le sont moins, ou qui se posent peu de questions, seront davantage tenteÌ s par le « ni-ni », moins invasif et impliquant ? Presque au meÌ‚me moment, voilaÌ€ que l’EÌ glise catholique de Belgique remet sur le meÌ tier sa manieÌ€re d’aborder la cateÌ cheÌ€se (voir l’EÌ clairage de ce numeÌ ro). Dans un monde qui change, l’acceÌ€s aux sacrements doit s’adapter, et ne plus eÌ‚tre un acte automatique associeÌ aÌ€ l’arriveÌ e des enfants aÌ€ l’aÌ‚ge de la communion ou de la confirmation. D’autant que, dans de nombreux cas, l’acte eÌ tait souvent sans lendemain : la feÌ‚te passeÌ e, combien d’enfants (et de parents) retournaient encore aÌ€ l’eÌ glise ?
DoreÌ navant, les sacrements ne marqueront plus les passages de la vie comme autant d’eÌ tapes initiatiques.
Sur le fond, ce changement ne peut eÌ‚tre que salueÌ : il redonne du sens aÌ€ la deÌ marche sacramentelle, et dans une socieÌ teÌ en perte de repeÌ€res sur les questions de sens et de spiritualiteÌ , il offre aux cateÌ chumeÌ€nes l’itineÌ raire qui leur permettra de poser des actes raisonneÌ s.
Reste que le nouveau parcours sera plus long et plus exigeant que les preÌ parations traditionnelles aÌ€ ce qu’on a continueÌ aÌ€ appeler la « petite » et « grande » communion... AÌ€ l’instar du choix entre « rien » et un cours philosophique ou de morale, la cateÌ cheÌ€se revisiteÌ e continuera-t-elle aÌ€ attirer ceux qui ne sont pas deÌ jaÌ€ convaincus ou solide- ment ancreÌ s dans la foi de leurs parents ? Ne risque-t-elle pas d’eÌ‚tre deÌ laisseÌ e par ceux qui, enfants comme parents, ne sont pas, deÌ€s le deÌ part, preÌ‚ts aÌ€ l’effort demandeÌ ?
Les cours de l’enseignement officiel et le renouveau cateÌ cheÌ tique posent une question aÌ€ peu preÌ€s semblable : celle du rapport entre la deÌ couverte d’une religion ou d’une deÌ marche de foi et les conditions d’existence de la plupart de nos contemporains. AÌ€ ne vouloir ou ne pouvoir s’adresser qu’aux « plus forts », les religions se rendent-elles compte qu’elles laissent en route une partie du peuple de Dieu ?
La graine doit-elle deÌ€s le deÌ part eÌ‚tre planteÌ e dans une bonne terre, proteÌ geÌ e du froid et couveÌ e par une bonne serre ? Ou tombe-t-elle ouÌ€ elle veut, poussant et donnant des fruits aÌ€ condition qu’on l’y aide laÌ€ ouÌ€ elle se trouve ?
FreÌ deÌ ric ANTOINE

Mot(s)-clé(s) : L’édito
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