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Edito

Mentir. Et puis après ?
On n’entend plus parler que de cela depuis le 21 septembre dernier. Afin de faire croire que ses modeÌ€les diesel eÌ taient peu polluants, le plus important constructeur automobile allemand les aurait tout simplement trafiqueÌ s graÌ‚ce aÌ€ un petit logiciel les rendant propres sur demande, en peÌ riode de tests, mais les laissant eÌ mettre de grandes quantiteÌ s de particules nocives lorsqu’ils circulent sur routes.Depuis cette reÌ veÌ lation, le monde s’eÌ tonne : est-il possible qu’une si illustre socieÌ teÌ ait pu se lancer dans pareille supercherie ? Qu’elle ait sciemment trompeÌ les autoriteÌ s, et « nous », ses fideÌ€les clients, qui mettaient en elle toute notre confiance ?
Certaines marques semblent aureÌ oleÌ es d’une telle renommeÌ e qu’on peine aÌ€ imaginer qu’elles puissent ne pas eÌ‚tre vertueuses.
Face aÌ€ certains de ces reÌ‚ves devenus accessibles, dont les « belles » voitures font partie, nous sommes parfois pris de ceÌ citeÌ preÌ coce et totale.
Comme si l’univers du marcheÌ automobile n’eÌ tait pas d’abord une vaste areÌ€ne sanguinaire ouÌ€ de grands conglomeÌ rats industriels ne cessent de se faire la guerre pour conqueÌ rir des parts de marcheÌ , couÌ‚te que couÌ‚te. Sans heÌ siter aÌ€ rendre plus vert que nature ce qui ne l’est pas. Sans s’interroger ne serait-ce qu’un instant sur le poids de la responsabiliteÌ sociale qu’endosse une entreprise lorsqu’elle choisit ainsi de jouer avec les normes et l’environnement.
La remarque, bien suÌ‚r, ne vaut pas que pour le secteur automobile. Tout l’univers commercial qui nous entoure ne cesse de jouer sur les eÌ quivoques, le green washing et les alleÌ gations mensongeÌ€res afin de faire croire au consommateur que ce qu’il propose est plus sain, plus propre, plus eÌ thique, que ce qu’offre la concurrence. Au risque de deÌ guiser des veÌ riteÌ s et de nous faire prendre des illusions pour la reÌ aliteÌ .
Alors que, dans les discours, chacun ne reÌ‚ve que de transparence, d’honneÌ‚teteÌ et de plus d’humaniteÌ , le mensonge n’a sans doute jamais eÌ teÌ aussi freÌ quemment utiliseÌ comme moyen de persuasion, de conqueÌ‚te eÌ conomique et de gouvernance des EÌ tats. Certaines socieÌ teÌ s s’en accommodent mal. Aux EÌ tats-Unis, ce que l’on reprochera aÌ€ un individu ou aÌ€ une entreprise ne sera pas tant de se mal conduire que de n’avoir pas dit la veÌ riteÌ . Ailleurs dans le monde, on semble de plus en plus enclin aÌ€ banaliser l’existence des tromperies en tous genres. Mentir est devenu normal, presque leÌ gal. Et en tout cas souvent justifieÌ . on en vient ainsi parfois jusqu’aÌ€ saluer l’inventiviteÌ de ceux qui reÌ ussissent aÌ€ duper le mieux leur entourage. Combien des proprieÌ taires des voitures concerneÌ es par la tromperie sur les normes de pollution ne se reÌ volteront ainsi jamais au nom de l’atteinte que ces veÌ hicules ont fait aÌ€ l’environnement ? Combien ne se preÌ occuperont jamais de ce point, mais reÌ agiront parce que, deÌ sormais, leur automobile a moins de valeur que celle qu’ils imaginaient ?
N’est-il pas temps de tout simplement reÌ apprendre aÌ€ eÌ‚tre honneÌ‚te ? HonneÌ‚te avec les autres. Et pour cela, eÌ‚tre honneÌ‚te avec soi-meÌ‚me. Pour pouvoir sans honte se regarder les yeux dans les yeux, le matin, dans son miroir. Et eÌ‚tre fier de soi...
Frédéric Antoine

Mot(s)-clé(s) : L’édito
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