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Edito

VIVRE ENSEMBLE.
AÌ€ la fin de leurs humaniteÌ s, ils avaient entameÌ des eÌ tudes supeÌ rieures, et preÌ feÌ reÌ « vivre en kot » plutoÌ‚t que de faire la navette avec la demeure parentale. Le « commu », le « kot communautaire », avait recueilli leurs preÌ feÌ rences. Chacun sa chambre, mais des eÌ quipements collectifs et, notamment, la possibiliteÌ de geÌ rer en commun la cuisine et son frigo. « Mai 68 est passeÌ par laÌ€ », se sont dit les parents, voyant que les universiteÌ s elles-meÌ‚mes encourageaient ce mode de logement, ouÌ€ les amitieÌ s se tissent aÌ€ partir de rencontres impreÌ vues, parfois improbables, mais qui durent parfois ensuite toute une existence. Avec les reÌ seaux sociaux, les communauteÌ s virtuelles ont le vent en poupe. MeÌ‚me aÌ€ des milliers de kilomeÌ€tres, on peut toujours eÌ‚tre ensemble, s’eÌ mouvoir de concert et partager ses bons (ou moins bons) moments.

Les eÌ tudes termineÌ es, les lumieÌ€res de la ville les ont attireÌ s. Le boulot, la « vraie vie », c’est tout de meÌ‚me plutoÌ‚t laÌ€ que cela se passe. Oui, mais voilaÌ€ : encore faut-il avoir une bourse assez pleine pour pouvoir y trouver un logement. En faisant leurs comptes, ils n’en eÌ taient pas vraiment laÌ€. Alors qu’en se mettant aÌ€ plusieurs, le poids du loyer pouvait devenir plus abordable. MeÌ‚me par ceux qui n’avaient pas encore vraiment trouveÌ un « vrai » travail.
Ils ont donc opteÌ pour la « coloc ». Pas vraiment dans le style Renaud (« Viens chez moi, j’habite chez une copine »), mais avec seÌ rieux, en organisant l’a aire au maximum. Comme le raconte le reportage que nous proposons ce mois-ci (pp. 14-15), cela se passe plutoÌ‚t bien, surtout si on co-loue avec des amis qui se connaissent de longue date. Parfois, cela peut aussi tourner plus mal, si la confiance s’amenuise et que les relations se tendent, par exemple pour des questions d’argent. Ou que l’un des « coloc » s’en va sans crier gare (et pas toujours tout seul...).

Pour certains, cette vie commune ouÌ€ le « chez-soi » se limite aux m2 d’une chambre peut aussi finir par peser. Ils reÌ‚vent alors de davantage d’intimiteÌ , d’un espace plus « aÌ€ eux », surtout si la trentaine se des- sine et qu’ils se demandent s’il ne serait pas temps d’entrer dans l’aÌ‚ge adulte. Un jour, ils franchiront le pas. Mais l’expeÌ rience de la vie communautaire restera ancreÌ e dans leurs geÌ€nes, dans la manieÌ€re dont ils envisageront leur environnement, la socieÌ teÌ et les rapports humains.

AccrocheÌ s aÌ€ leurs smartphones, aÌ€ tout moment preÌ‚ts aÌ€ rebondir sur Facebook ou sur Snapchat et aÌ€ se raconter en direct sur internet, ils garderont aÌ€ jamais l’ideÌ e que ce qui fait l’eÌ‚tre humain est aussi la communauteÌ . L’homme est bien un animal social. MeÌ‚me si, de temps aÌ€ autre, il a besoin de redevenir loup solitaire, pour se retrouver lui-meÌ‚me.

Dans d’autres parties du monde, l’existence ne s’imagine pas sans le rapport au groupe et aÌ€ la collectiviteÌ . Aujourd’hui, les eÌ volutions de la socieÌ teÌ positionnent tous les coins de la planeÌ€te dans la meÌ‚me direction : celle de l’impeÌ rativiteÌ du vivre ensemble. Pas chacun chez soi, l’un aÌ€ coÌ‚teÌ des autres, mais l’un aux coÌ‚teÌ s de l’autre.

Frédéric ANTOINE

Rédacteur en chef

Mot(s)-clé(s) : L’édito
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