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Edito : Enfin, une parole

Enfin, une parole.

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« Je voudrais m’excuser aupreÌ€s de tous ceux pour qui la position du Vatican est douloureuse. » Mgr Bonny, eÌ veÌ‚que d’Anvers, n’a pas heÌ siteÌ aÌ€ reÌ agir au document reÌ digeÌ par le Vatican aÌ€ propos de la beÌ neÌ diction des couples homosexuels. Dans une lettre ouverte publieÌ e dans le Standaard, l’eÌ veÌ‚que reconnaiÌ‚t se « sentir mal ». « Je ressens une honte par procuration pour mon EÌ glise (...). Je voudrais m’excuser aupreÌ€s de tous pour qui ce document est douloureux et incompreÌ hensible (...) Leur douleur pour l’EÌ glise est la mienne aujourd’hui. »

Enfin une parole forte, engageÌ e ! Qui ne se met pas du coÌ‚teÌ d’un establishment ne s’appliquant qu’aÌ€ reÌ peÌ ter des interdictions. Une prise de position si forte que, quelques heures plus tard, elle a obligeÌ toute la ConfeÌ rence eÌ piscopale belge aÌ€ se prononcer sur le sujet.

Quand l’ensemble des eÌ veÌ‚ques de Belgique se fend d’un communiqueÌ ouÌ€ ils disent avoir « conscience que ceci est ressenti de manieÌ€re particulieÌ€rement douloureuse par de nombreux couples homosexuels croyants et leur famille (...) », ils laissent bien comprendre qu’ils ont du mal aÌ€ avaler la pilule vaticane. Au moment ouÌ€ ils ajoutent qu’ils encouragent les collaborateurs de l’EÌ glise aÌ€ poursuivre leur travail en faveur de l’inteÌ gration des homosexuels, leur position se lit entre les lignes. Enfin, lorsque leur texte mentionne un extrait d’une exhortation du pape dans laquelle il dit aÌ€ propos des gays et de l’EÌ glise qu’il faut « discerner, accompagner et inteÌ grer », la messe est dite.

Bien suÌ‚r, la prise de position de la confeÌ rence eÌ piscopale est plus subtile, politique, sibylline, que celle de Mgr Bonny. Elle a duÌ‚ eÌ‚tre le fruit d’un compromis entre la "tendance Bonny– et d’autres points de vue. Mais, depuis longtemps, le sommet du catholicisme belge n’avait pas oseÌ s’exprimer de cette manieÌ€re. Cela deÌ montre que, comme en Allemagne, l’EÌ glise belge n’a plus envie de garder le petit doigt sur la couture de l’eÌ tole face aÌ€ Rome. Ainsi nait l’autonomie des EÌ glises locales dont reÌ‚ve le pape. Pour François, qui s’est dit favorable aÌ€ la "cohabitation civile– des homosexuels, les reÌ actions belges constituent un soutien au combat qu’il meÌ€ne pour ouvrir l’EÌ glise au monde et non aux eÌ dits des congreÌ gations romaines.

La prise de position belge va toutefois au-delaÌ€ de la position du pape, pour qui tout doit eÌ‚tre "miseÌ ricorde– , ce que le dictionnaire Robert deÌ finit comme une « pitieÌ par laquelle on pardonne au coupable ». Jugeant qu’on ne peut marier des eÌ‚tres dans le peÌ cheÌ , la congreÌ gation pour la doctrine de la foi estime, comme le pape, que les couples gays sont composeÌ s de personnes "coupables– . Coupables d’eÌ‚tre homosexuelles, et de vouloir vivre en couple, beÌ nies par Dieu. Peut-on eÌ‚tre coupable de cela. Est-on alors dans le peÌ cheÌ ?

Sans remettre la doctrine en cause, la deÌ claration des eÌ veÌ‚ques belges montre que des feneÌ‚tres sont deÌ jaÌ€ ouvertes, et qu’on peut encore faire mieux. Sur le terrain, des preÌ‚tres n’heÌ sitent pas aÌ€ beÌ nir l’amour qui unit deux personnes homosexuelles, tout comme ils beÌ nissent de meÌ‚me manieÌ€re une union suivant un divorce. Le rappel romain ne changera rien aÌ€ cela, ni au
« discernement » dont font preuve aÌ€ ce sujet certains preÌ‚tres. Mais pas tous. Et pas tous ceux que ces meÌ‚mes eÌ veÌ‚ques
s’empressent d’envoyer dans des paroisses pour remplacer les vieux cureÌ s. Qui avaient, eux, perçu comment eÌ voluaient les humains de ce sieÌ€cle.

Les EÌ glises ceÌ leÌ€brent ce mois-ci les derniers jours du Christ, et sa PaÌ‚ques. N’eÌ tait-il pas venu pour dire que tout eÌ tait amour, et qu’il n’eÌ tait pas laÌ€ pour juger ? Mais il est vrai que c’est pour cela qu’on l’a crucifieÌ ...

Frédéric ANTOINE

Rédacteur en chef

Mot(s)-clé(s) : L’édito
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