François sur le chemin du soleil

François sur le chemin du soleil

Le 28 février 2013, l’annonce de la démission de Benoît XVI en avait surpris plus d’un. Moins de quinze jours plus tard, le 13 mars, je me trouve place Saint-Pierre.

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Publié le

22 avril 2025

· Mis à jour le

26 avril 2025
Photo : F. ANTOINE / L’APPEL

Peu après 19h, une fameuse fumée blanche annonce l’élection de son successeur. Là aussi, la surprise est totale, ce choix ayant été rapide, alors que l’élu n’est connu que de quelques éminents vaticanistes. Autre surprise : le nouveau pape se distingue de son prédécesseur par ses originalités : sa naissance sud-américaine, son appartenance à l’Église dans l’Église qu’est l’ordre des Jésuites, et sa réputation de simplicité et de frugalité.

Pour la foule qui découvre dans la nuit ce petit homme un peu replet dans le halo des projecteurs, tout cela est inconnu. Seul son prénom est connu : celui du poverello (le pauvre gars), le mystique fondateur de l’ordre des Franciscains, adeptes de la pauvreté évangélique. Un prénom qu’aucun pape n’avait jamais choisi.

Alors que le crachin s’arrête place Saint-Pierre, un frémissement traverse le public. L’espoir que soit venue l’heure des changements. Le primat de Belgique, le cardinal Danneels, ne dira pas autre chose le lendemain en conférence de presse au collège belge de Rome. Pour lui, qui n’était pas en odeur de sainteté sous Benoît XVI, le choix de Bergoglio est une évidence. Et il ne cache pas son contentement.

Nombreux sont cependant alors ceux qui doutent de la pérennité de ce que j’appellerai dans un éditorial « l’effet Pancho » (diminutif de François en Amérique du Sud) (L’appel, 05/2013). Certes, il avait tout de suite choisi de casser les codes, ordonnant la mise au rancart de signes de richesse et d’arrogance précédemment associés à la fonction. Certes, il avait renoncé au style de vie des papes dans les ors du Vatican. Adepte de sobriété et de normalité, il voulait poursuivre une vie simple dans un milieu qui ne l’était pas.

Mais la machine vaticanesque est une hydre à de nombreuses têtes. Le frêle Argentin, déjà âgé, arriverait-il à les couper toutes avant de se faire manger par la bête ? L’Histoire démontrera que François a fait du mieux qu’il a pu, se montrant presque révolutionnaire dans certains domaines, mais plutôt conservateur dans d’autres, comme l’écrivait l’analyste belge Emmanuel Van Lierde dans Le pape François. Le révolutionnaire conservateur (magazine-appel.be/les-deux-faces-du-pape-francois). Nombreux seront les bilans de ces douze ans de travaux d’Hercule auxquels il s’était attelé.

« L’Église est appelée à sortir d’elle-même et à aller dans les périphéries, les périphéries géographiques, mais également existentielles, là où résident le mystère du péché, la douleur, l’injustice, l’ignorance, là où le religieux, la pensée, sont méprisés », avait dit le cardinal Bergoglio lors des Congrégations générales, ce qui avait fortement marqué les esprits de ses futurs électeurs. Il ajoutait :« Quand l’Église ne sort pas pour évangéliser, elle devient autoréférentielle et tombe malade. Les maux qui (…) frappent les institutions ecclésiastiques sont l’auto-référentialité et une sorte de narcissisme théologique. L’Église autoréférentielle prétend retenir le Christ à l’intérieur d’elle-même et ne le fait pas sortir. »

François sera fidèle à ces propos qui ont fait figure de programme électoral, tenant bon contre vents et marées tant aux frontières de l’Église qu’au cœur de ses institutions. Certaines de ses prises de position, notamment lors de son voyage en Belgique, ne resteront pas comme la manifestation de ses meilleurs côtés alors que, en même temps, il a fait entrer les catholiques dans l’ère de l’écologie.

La fatigue et la maladie auront eu raison de son opiniâtreté. Reste à espérer que son successeur n’incarnera pas le “coup de balancier” que l’on peut redouter après un pareil personnage.

Frédéric Antoine

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