Accompagner la renaissance
Accompagner la renaissance
Il faut d’abord accepter de tourner les pages du passé, de rechercher plus de sagesse, avant d’accéder à l’espoir d’une renaissance.
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L’hiver est sur nous, les jours raccourcissent, le froid endort la nature, l’année civile s’éteint. « C’est la saison où tout tombe, Aux coups redoublés des vents ; Un vent qui vient de la tombe, Moissonne aussi les vivants », disait si bien Lamartine. La lassitude menace de nous rattraper, alors que les accomplissements de l’année sont nécessairement insuffisants face aux enjeux planétaires, climatiques, démocratiques. À ce moment, précisément, les fêtes de fin d’année nous remobilisent. Le monde chrétien évoque la symbolique de la naissance d’un enfant qui pourrait changer le monde, avec les célébrations de Noël, puis la force de l’alliance de la circoncision de cet enfant, avec le Nouvel An. Le monde juif s’appuie sur la fête des Lumières, « chaque jour une de plus qu’hier », pour encourager un cycle vertueux qui réveillera l’espoir. Il met en valeur le courage d’une famille de prêtres refusant l’oppression, refusant de s’incliner devant l’injonction à l’assimilation, et partant à la reconquête du Temple de Jérusalem spolié et profané.
Ils réussissent à opérer une remise en fonction complète de ce haut lieu. Vient le moment de rallumer la lumière perpétuelle qui symbolise la persistance d’un espoir inextinguible, de raviver la flamme du chandelier à sept branches, la ménorah. Bien que la dernière fiole d’huile, épargnée par la destruction, ne contienne que quelques gouttes, à peine suffisantes pour une journée, ils rallument la lueur de l’espérance, et – miracle ! – la lumière ne s’éteindra pas, elle persistera pendant huit journées, laissant le temps de ramener l’huile nécessaire à son entretien.
CHALEUR DES BOUGIES
Que pouvons-nous apprendre de ce petit miracle ? Rien concernant les lois physiques de la combustion, c’est certain. Rien non plus sur le plan historique, puisque cette gentille histoire n’a rien à voir avec le cours de la grande Histoire. Le judaïsme choisit d’utiliser ce récit au service d’une action, qui consiste aujourd’hui encore à allumer des bougies pendant huit jours, en chantant des chansons, en mangeant des beignets et des galettes de pomme de terre, en jouant à la toupie et en distribuant des pièces (ou des cadeaux) aux enfants, et en racontant des histoires de courage et d’engagement. Alors que le froid endort la nature, la chaleur des bougies de la fête de Hanouka réchauffe les cœurs. Une année se meurt, mais une nouvelle année va commencer. « Une fin est toujours un commencement », comme le dit la poétesse Lea Naor. Mais les transitions ne se font pas toujours facilement, bien au contraire. Il faut d’abord accepter de tourner les pages du passé, de rechercher plus de sagesse, avant d’accéder à l’espoir d’une renaissance. Ces mots ne sont pas que des mots, ils demandent notre investissement personnel important, engageant, souvent douloureux. Nos efforts eux-mêmes peuvent ne pas suffire, nous avons besoin de soutien, de dynamiques collectives. C’est ce que nos spiritualités comprennent.
TOURNER DES PAGES
Dans cet esprit, nous avons commencé en ligne et en présentiel un cycle de travail qui nous a conduits sur ce chemin. Nous avons commencé par étudier et approfondir le fait de “tourner des pages”, avant de “chercher la sagesse”, et nous commencerons en décembre à “accompagner les renaissances”, à travers les douleurs et les joies de l’enfantement. Ces actions ne se font pas instantanément, les Rencontres de Cocréer proposent de consacrer un mois entier à l’approfondissement de ces thématiques, tout comme le christianisme sacralise la période de l’Avent et tout comme le judaïsme mobilise une semaine entière pour fêter Hanouka. Une nouvelle année doit naitre, et une nouvelle version de nous-mêmes doit émerger. Certains de nos espoirs disparaissent, pour laisser place à de nouveaux projets. « Ils tombent alors par mille, Comme la plume inutile, Que l’aigle abandonne aux airs, Lorsque des plumes nouvelles, Viennent réchauffer ses ailes, À l’approche des hivers. »
Rabba Floriane CHINSKY
