Un mentorat vers l’emploi

Un mentorat vers l’emploi

L’ASBL belge DUO for a JOB organise un programme d’accompagnement intergénérationnel et interculturel afin de faciliter la mise à l’emploi des jeunes issus de l’immigration, tout en revalorisant l’expérience des seniors. Elle a aujourd’hui quinze implantations dans des villes belges, dont Bruxelles, Charleroi et Liège. 

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Publié le

31 janvier 2025

· Mis à jour le

26 février 2025
Deux femmes s'enlacent et se tapent dans la main

DUO for a JOB est née d’un double constat. Il existe, en Belgique, une inégalité d’accès au marché du travail avérée pour les jeunes issus de l’immigration. D’un autre côté, les personnes de plus de cinquante ans y présentent un des taux d’activité des plus faibles d’Europe et font face à un manque de valorisation de leurs compétences. En faisant se rencontrer ces deux publics, l’association veut contribuer à réduire cette difficulté pour ces jeunes de trouver un emploi, à exploiter le savoir des aînés et à lutter contre la discrimination en recréant du lien social, de la compréhension et de la solidarité de proximité. Pour bénéficier de son aide, il faut avoir entre 18 et 33 ans et être issu de l’immigration non européenne. Tout en possédant un titre de séjour valide autorisant à résider et à travailler en Belgique.

UN RECRUTEMENT VARIÉ

Julie Fonteyn, l’une des quatre animatrices de l’antenne de Charleroi, explique que les terrains de recrutement des mentors (les séniors) et les mentees (les jeunes) sont divers. La première est le bouche-à-oreille. Tandis que les premiers partagent leur expérience et la richesse de leur rencontre avec les seconds, ceux-ci témoignent auprès de leurs connaissances de ce que cela leur a apporté. Les mentors participent aussi à différents évènements, comme les salons des aînés. Et les médias et les réseaux sociaux sont de bonnes sources de contact. 

Par ailleurs, DUO for a JOB souhaite développer la création de partenariats avec des entreprises qui partagent les mêmes valeurs et aimeraient intégrer le mentorat dans leur politique de gestion des ressources humaines et d’aménagement de fin de carrière. Elles pourraient proposer à leurs employés de plus de 50 ans d’en faire l’expérience avec l’idée que les compétences qu’ils développeront pourront leur servir dans leur métier. Et pour certains d’entre eux, ce peut être une bulle d’oxygène dans la semaine de travail permettant d’améliorer leur bien-être et d’avoir ainsi un impact positif sur l’entreprise elle-même. De nombreux partenariats publics ou associatifs se créent également comme les acteurs de la recherche d’emploi : le Forem en Wallonie, Actiris à Bruxelles ou VDAB en Flandre. Sans oublier les CPAS, les associations en contact avec un public migrant ou issu de l’immigration. 

SUR BASE VOLONTAIRE

Le programme débute par une séance d’information, tant pour les potentiels mentors que pour les mentees, en présentiel ou en vidéo. Il est en effet fondamental pour les animateurs d’expliquer qui ils sont et ce qu’ils font, de présenter leurs objectifs et d’exposer la façon dont ils veulent les réaliser. Tout en rappelant que DUO for a JOB n’est accessible que sur une base volontaire. Ceux qui s’investissent doivent le faire parce qu’ils en ont le désir, qu’ils y pressentent un intérêt, et non pas parce qu’ils y sont contraints. « Je viens, je m’informe. Et ensuite, j’ai la liberté de dire, que c’est quelque chose qui me convient ou pas. Ou que cela m’intéresse, mais éventuellement plus tard », explique Julie Fonteyn. 

Ensuite, à ceux qui souhaitent s’investir, l’ASBL propose un entretien individuel qui se fait avec un coordinateur ou une coordinatrice. L’objectif est de faire connaissance, d’en savoir un peu plus sur la personnalité du candidat, jeune ou aîné. Avec le mentee, sont abordés son parcours scolaire éventuel, sa formation, son expérience, son projet et où il en est. Est-il au clair, quelles sont ses attentes, pourquoi il est venu, que recherche-t-il ? Pour le mentor, c’est l’occasion de préciser sa formation, sa carrière professionnelle et les activités qu’il peut mener en parallèle. L’idée est d’identifier les diverses compétences, techniques et autres, qu’il a développées. La question de sa motivation est ensuite abordée ainsi que la manière dont il se projette dans l’accompagnement. 

UNE FORMATION INDISPENSABLE

Une formation de quatre jours est obligatoire avant un premier accompagnement. Elle se compose de huit modules d’une demi-journée qui ont lieu en présentiel et en collectif par groupes de cinq à dix personnes. Elle propose une mise en contexte : l’histoire de l’immigration, en quoi consiste le parcours d’un réfugié, celui d’un étranger… Le postulant prend dès lors conscience de la réalité du choix de venir en Belgique et des exigences que cela comporte pour y vivre de manière régulière. Un second module est consacré à l’écoute active, essentielle dans le rôle du mentor. Y est abordé tout ce qui relève de l’interculturalité et comment la gérer. D’autres modules plus pratico-pratiques sont destinés à être utilisés dès le début de l’accompagnement, notamment comment fixer un objectif et avoir un plan d’action ? Durant ces journées, de multiples informations sont également transmises sur le monde de l’insertion socio-professionnelle au niveau local. Le but n’est pas de faire des mentors des spécialistes, mais tout au moins de leur donner une connaissance de ce qui existe sur place et vers où ils pourraient diriger le jeune qu’ils accompagnent. Pour les mentees, aucune formation n’est organisée.

L’équipe des coordinateurs crée les duos lors de la séance de préparation. Elle part toujours du profil du jeune afin de trouver le mentor qui lui convienne le mieux, en choisissant celui dont la compétence et la personnalité semblent la plus adéquate. Les critères peuvent être son secteur d’activité ou son métier, ses capacités…. Mais, parfois, le choix se fera en fonction du besoin du jeune, de ce qu’il faut surtout travailler avec lui. Comme par exemple, la préparation à des entretiens d’embauche. « Pour celui qui ne sait pas quoi faire et n’a plus confiance en lui, nous allons plutôt rechercher un mentor doté de compétences qui ne sont pas nécessairement liées à son projet », commente la coordinatrice carolo. 

UN PROFESSIONNALISME CHALEUREUX

Avant que le duo ne soit choisi et ne démarre, raconte Julie Fonteyn, « nous faisons se rencontrer dans nos locaux, le jeune et le senior pour vérifier si le courant passe bien. Si c’est le cas et que les deux souhaitent travailler ensemble, nous signons la convention de mentorat qui permet de remettre le cadre et d’expliquer les rôles et responsabilités de chacun. Ils peuvent alors commencer. Les duos sont autonomes, ce sont eux qui vont décider quand et où ils se rencontreront et ce qu’ils feront lors de chaque séance ». Un cadre est néanmoins proposé. Idéalement, une rencontre hebdomadaire d’une à deux heures est utile car la régularité permet un meilleur fonctionnement. 

Chaque duo a un coordinateur ou une coordinatrice qui lui est attitré. Elle est la personne de référence pour toute question pendant les six mois durant lesquels ils se verront. « L’encadrement, pour nous, c’est l’idée d’un professionnalisme chaleureux. C’est une de nos valeurs. Nous avons la volonté de faire bien les choses, notamment par la formation des mentors, le cadre, la structure et la coordination pendant la durée du duo. Ce professionnalisme se retrouve dans la façon dont nous travaillons en équipe, mais de manière chaleureuse, accueillante et bienveillante du début jusqu’à la fin. »

UNE PRÉSENCE LOCALE 

Par sa présence locale, DUO for a JOB grandit et se développe en étant au plus près de ceux et celles qu’elle vise. « Dans la recherche d’emploi et dans tout le tissu associatif public et des structures qui sont autour, observe Julie Fonteyn, il est certain nous avons intérêt à mettre le jeune en contact avec les structures locales plutôt que de l’envoyer par exemple à Bruxelles, où c’est Actiris qui est compétent. Alors que, pour lui, c’est le Forem et que les ASBL présentes à Bruxelles ne sont pas les mêmes que celles de Charleroi. Notre antenne travaille en étroite collaboration avec celles des autres villes. »

La responsable spécifie que l’objectif n’est pas nécessairement la mise à l’emploi à court terme. Un jeune peut arriver avec un projet professionnel déjà très précis, et donc assez proche de sa réalisation. Dans ce cas, le tâche du duo va consister à chercher des offres d’emploi, à travailler à la rédaction du CV et de la lettre de motivation, et à la préparation aux entretiens d’embauche. Mais, parmi les jeunes qui se présentent, certains n’ont pas fait d’études et sont donc sans diplôme, n’ont pas suivi de formations et ne possèdent pas d’expérience professionnelle. Et, généralement, ne savent pas très bien ce qu’ils ont envie de faire. Dans ces situations, si, à terme, le but de DUO for a JOB est bien de lui trouver un travail, il sera préalablement nécessaire de l’aider à avoir une idée plus précise de ce qu’il veut faire. 

Thierry MARCHANDISE

duoforajob.be/

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